Syrie: Bachar el-Assad est désormais condamné… à survivre indéfiniment


Près de 24 heures après l’annonce par le Président François Hollande de l’entrée de la France en guerre en Syrie, l’aviation française a lancé, le 08/09, ses premiers vols de reconnaissance au-dessus des régions syriennes contrôlées par l’Etat Islamique. Ce nouveau revirement français, alors que Paris mobilisait ses moyens il y a quelque temps pour mener des frappes contre le régime Assad, est motivé par une série de considérations géopolitiques, sécuritaires, militaires, humanitaires etc. Même s’il ne ramènera pas Bachar et Asma el-Assad dans la tribune d’honneur du 14 Juillet, ce choix, lourd à assumer pour un Président français qui affirmait sans cesse que le régime syrien était fini, est une bouffée d’oxygène pour Damas. C’est une leçon de realpolitik qui ne serait pas neutre pour la suite des évènements au Moyen-Orient et au-delâ.

Le Président Bachar el-Assad, qui survivra probablement au Roi d’Arabie saoudite et aux mandats des  Présidents américain et français, profite d’un contexte géopolitique loin d’étre stabilisé, et d’une détermination russe et iranienne à faire hausser au maximum les enchères avant de passer à d’éventuels compromis en Syrie. Il profite surtout de la visibilité, aujourd’hui plus grande, de la menace que représente l’Etat Islamique pour l’Europe toute proche, maintenant que Damas est à portée de sabre du groupe terroriste, que les cellules djihadistes noyautent les pays européens, et que l’afflux massif et inépuisable de migrants commence à déstabiliser l’UE. Assad n’en demandait pas autant…

Les Russes maintiennent leurs positions, et les renforcent semble-t-il, sur le littoral où se concentrent les soutiens du régime et les minorités alaouites et chrétiennes, alors que l’Iran et le Hezbollah ne cessent de consolider leurs acquis dans le Qalamoun et dans les régions protégeant Damas. La Turquie est entrée en scène, militairement, profitant de son engagement contre l’EI, pour continuer d’écraser le PKK, tout en appréhendant les conséquences, directes et indirectes, sécuritaires et politiques, de ses choix politiques en Syrie ces dernières années. Quant aux pétromonarchies arabes du Golfe, aujourd’hui embourbées dans une guerre meutrière au Yémen, elles maintiennent, officiellement, leur détermination à renverser Bachar el-Assad, mais peinent à imaginer le régime qui lui succèdera, encore moins la répartition des influences au sein de la Syrie post-Assad…

Pour le moment, l’Arabie saoudite, les Emirats Arabes Unis et le Qatar, accordent la priorité au Yémen, avec les encouragements de Washington, alors que l’Iran donne la priorité à la Syrie, avec les encouragements de Moscou. Tout cela semble se dérouler sous le plafond des arrangements irano-américains, ce qui permet à l’Iran de faire quelques concessions au Yémen, en échange de quelques concessions saoudiennes en Syrie. C’est d’ailleurs à ce niveau qu’intervient Paris pour convaincre l’axe saoudo-émirati et avec lui le Qatar de la nécessité de prolonger la durée de survie du régime Assad, le temps de contrer la menace terroriste, d’écraser l’Etat Islamique, de finaliser les arrangements encore en souffrance avec l’Iran et la Russie…

En d’autres termes, Paris, après Washington, doit faire avaler la pilule à ses alliés de référence, Saoudiens, Emiratis et Qataris, pour leur signifier que le régime Assad est désormais condamné…à survivre indéfiniment…

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