La Royal Air Force of Oman poursuit le développement, modéré et pragmatique, de sa force de frappe, avec la commande fin 2011 de 12 F-16C/D supplémentaires, et l’upgrade de 12 autres F-16 en service depuis 2005. Des Hawk, dont 12 Hawk Mk203 de combat, et des Jaguar réhabilités, sont également en service dans la RAFO, une institution héritière d’une longue tradition britannique, depuis sa création en 1959 avec du personnel et des appareils britanniques. « L’américanisation » de la RAFO, à la faveur des évolutions géopolitiques et militaires qui ont marqué la région du Golfe surtout au cours des dernières années, n’empêche pas Mascate de s’intéresser à d’autres avions de combat et à d’autres horizons industriels. L’intérêt semblait n’être plus « qu’intellectuel », une sorte d’exercice pratique utile pour l’état-major de la RAFO, alors que l’ultime décision, politique, semblait être déjà prise…
Ainsi, le JAS 39 Gripen suédois était resté en compétition avec l’Eurofighter Typhoon « européen » pour une commande de 12 avions d’une valeur atteignant les $2md. Mais il semble que la limite de cette « diversification », en dehors du camp « anglo-saxon », soit atteinte, avec l’éviction du Gripen de la course, au profit de l’Eurofighter Typhoon défendu auprès de la cour par BAE Systems et par Londres.
Pour l’usage que la RAFO en fait, les avions de la même génération aujourd’hui proposés sur le marché auraient tous pu faire l’affaire. L’intégration militaire d’Oman et de son Armée de l’Air au sein du Conseil de Coopération du Golfe et de la force commune « Bouclier de la Péninsule » n’est pas un argument décisif pour le sultan Qabous Ben Saïd lors du choix d’un avion disponible chez le puissant voisin saoudien dont la Royal Saudi Air Force repose sur des F-15/-16 et sur des Tornado/Eurofighter. Mais c’est bien évidemment l’intégration de la RAFO au sein du dispositif américain et allié, voire la « standardisation » des systèmes omanais ainsi alignés entièrement sur les systèmes américains et britanniques, qui expliquerait l’éviction d’autres avions concurrents, dont le Rafale de Dassault Aviation ou maintenant le JAS Gripen de SAAB. Les paramètres politiques, et le poids évident de la présence américaine et britannique à Mascate, jouent sans aucun doute aussi un rôle déterminant dans la décision du sultan Qabous et de son état-major de s’enfermer dans un quasi-monopole avec l’industrie aéronautique américaine et britannique.
Pourtant, aussi bien ancré soit-il dans le camp américain et britannique, le sultan Qabous reste un adepte d’une politique extérieure équilibrée, comme il le démontre bien en maintenant, à travers le temps, des relations quasi-normales avec la république islamique d’Iran. Son histoire personnelle et celle de son pays doivent l’encourager cependant à rester « anglo-saxon », lorsqu’il s’agit de décisions stratégiques et hautement politiques comme l’acquisition d’une flotte de combat. Sa lecture des évolutions géopolitiques doit l’enfermer, elle aussi, dans son monde « unipolaire »… A d’autres niveaux, moins stratégiques, la « diversification », acceptée ou même parfois encouragée, ouvre le sultanat à d’autres partenaires, utiles, et parfois nécessaires, mais jamais aussi indispensables, aux yeux du sultan, que Londres et Washington…
A Oman aussi, et comme en Arabie saoudite, les « airs » sont sous le contrôle exclusif des alliés traditionnels américains et britanniques. Les Saoudiens, qui s’érigent en maître d’œuvre d’un dispositif d’intégration globale des moyens aériens du CCG, sous le parapluie américain, ont les moyens, financiers et opérationnels, de garder une petite part de diversification au sein de leur RSAF. Si la RSAF excluent automatiquement de ses calculs des avions de combat modernes et performants comme le Rafale et le Gripen, elle reste relativement ouverte à une certaine diversification à d’autres niveaux, moins stratégiques, avec l’acquisition d’avions non américains et non britanniques, de ravitaillement, d’entraînement, de soutien : Cessna, A-330/-340, A400M, Pilatus PC-9, CASA CN-235, Super Mushshaaq.
Deux autres pays arabes du Golfe, qui ont les moyens financiers d’une diversification de leurs flottes d’avions et de leurs sources d’approvisionnement en armes de manière plus générale, le Qatar et les Emirats Arabes Unis, affichent toujours une volonté politique de maintenir leur indépendance stratégique, même si « l’américanisation » progressive de leurs systèmes d’armes et de leurs outils militaires est un fait évident depuis quelques années. C’est sur ces deux marchés, alliés stratégiques de la France et partenaires militaires conventionnels de ce pays, que le Rafale français est attendu au cours des prochains mois. La volonté politique est demandée aux Qataris et aux Emiratis, mais aussi aux Français. Elle suppose une action coordonnée en direction de ces deux pays, et une implication politique au plus haut niveau.