François Hollande au Liban: contenir Assad, Daech et les flux migratoires?


Le Président français François Hollande a attendu d’avoir concrétisé son début de revirement en Syrie, avant de confirmer sa visite, programmée pour le 01/10, au Liban. Entretemps, l’Armée de l’Air française poursuit ses missions de surveillance au-dessus de la Syrie, en attendant de lancer des frappes contre l’Etat Islamique redevenu pour l’occasion l’ennemi commun pour Paris et Damas.

Il a surtout attendu d’avoir repris langue avec l’Iran, après l’accord nucléaire qu’il a tellement combattu avec son Ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius. Se rendre au Liban, tombé, en partie pour les plus optimistes, sous influence iranienne, en attendant d’éventuels rééquilibrages saoudo-iraniens, ne pouvait se faire en étant en désaccord avec Téhéran.

Cette visite ne peut se faire, bien sûr, sans une coordination étroite avec les partenaires arabes de référence de Paris, Riyad, Abu Dhabi et Le Caire.

Et pour qu’elle puisse réussir, une telle visite doit aussi être en harmonie avec les arrangements irano-américains en cours, tout en gardant en perspectives les vues russes et israéliennes.

Cela semble beaucoup pour une si courte visite à un camp de réfugiés…

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La France a un engagement moral très fort envers le Liban. Cela est d’ailleurs réciproque, en dépit des malentendus occasionnels. Cet engagement est multiforme, et se maintient en dépit de certains revers, qu’on espère passagers.

Une des formes de cet engagement, les plus symboliques et les plus visibles, concerne la défense du Liban: la défense de sa souveraineté, de ses frontières, de sa sécurité. Ainsi, la France préserve son rôle, central, au sein de la FINUL, intensifie son aide opérationnelle aux Forces armées libanaises engagées dans une lutte ouverte contre le terrorisme (aujourd’hui, avec l’aide de l’allié saoudien: DONAS). La visite à Beyrouth (10/09) du CEMA le général Pierre de Viliers, alors que la France monte en puissance contre Daech en Syrie et que les FAL se préparent aux pires scénarios sur le front djihadiste, s’inscrit dans le cadre de cet engagement, d’autant qu’elle intervient à la veille de la visite de F. Hollande.

Tout cela est apprécié par les Libanais qui ne risquent pas d’accueillir de sitôt un invité de ce calibre, alors qu’ils s’enfoncent dans une crise politique sans précédent. Mais, cette visite du Président français, qui ne sera pas accueilli par son homologue libanais, ouvre la voie aussi à de nombreuses interrogations, des plus innocentes au plus engagées…

Dans cette note de 3.450 mots, réservée à ses clients, MESP ne manque pas de voir dans cette visite une bonne dose d’opportunisme supposée camoufler une incohérence géopolitique certaine, et beaucoup d’opacité, notamment au niveau du dossier brûlant des réfugiés.

Si l’opportunisme est justifié dans l’exercice du pouvoir politique, même en l’absence d’un mea culpa et d’une sincère remise en question des actions précédentes, le machiavélisme peut-il l’être aussi, entre amis historiques?

C’est ainsi que les Libanais ont le droit de comprendre cet emballement de l’Elysée à organiser un voyage présidentiel au Liban “pour y visiter un camp de réfugiés” et afin de les “aider à rester là-bas”… En effet, à entendre le Président français, qui ne désespère pas par ailleurs de contribuer à débloquer la crise politique et présidentielle au Liban, la question devient légitime de savoir s’il ne vient pas dans ce petit pays pour vendre cette idée, qui condamnerait sa diversité culturelle, son modèle de tolérance et d’ouverture, qui est celle d’y organiser l’implantation définitive de deux millions et de demi de réfugiés syriens et palestiniens…

On retiendra donc, avant toute autre chose, que le Président Hollande se rend à Beyrouth, alors que la crise des migrants venus du sud de la Méditerranée déstabilise l’UE, avec l’idée, bien plus déstabilisatrice pour le Liban, d’éviter la contagion des deux millions et demi de réfugiés syriens et palestiniens présents sur le territoire libanais par cette fièvre migratoire. Pourtant, il ne doit pas ignorer la précarité des équilibres confessionnels, et les risques que l’implantation au Liban de centaines de milliers de réfugiés fait porter au modèle sociopolitique libanais (le Premier ministre britannique David Cameron non plus, lui qui vient d’effectuer aussi une visite éclair au Liban, le 14/09, afin d’y visiter les réfugiés…).

Dans cette note, MESP s’attarde sur

(i) la crise migratoire, qui concerne désormais le Liban et la France

(ii)  coopération franco-libanaise en matière de défense et de sécurité notamment,

(iii) les efforts que la France et son nouvel Ambassadeur à Beyrouth Emmanuel Bonne déploient afin d’imaginer des sorties aux crises politiques internes actuelles.

MESP s’intéresse aussi

(iv) à l’évolution de l’image de la France auprès des Libanais, en fonction, surtout, de leurs affinités politiques et de leur interprétation des actions menées actuellement par Paris sur les dossiers régionaux.

En conclusion, MESP propose

(v) une communication de crise pour “libaniser” cette visite dont les vraies motivations restent confuses.

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